Les journaux français sont coutumiers de phrases du type « dans les länder (régions allemandes)… » semant ainsi la confusion de la définition politique française de la Région avec celle, allemande, du Land. Pourtant les deux notions n’ont rien de comparable.
Land c’est d’abord la terre ferme émergée, puis la terre arable et, par extension, la campagne par opposition à la ville, voire un paysage typique. Dans ce cas Land et région peuvent se ressembler.
Mais, en politique, le mot Land a le sens du français Etat, à savoir un espace délimité par une frontière et avec son gouvernement propre. Les Régions sont des subdivisions politiques et administratives de l’organisation décentralisée de Etat français. Les seize Länder sont des Etats unis en fédération (littéralement Bund).
Quand un Land légifère en matière d’éducation, la RFA ne mène pas une politique décentralisée de l’enseignement, simplement le Bund n’a que peu de compétence en la matière. La RFA n’est pas un état décentralisé, mais un ensemble d’Etats qui ont centralisé et délégué certaines compétences à un gouvernement commun. Entre Etats et Gouvernement fédéral règne, comme en Europe et dans toutes les Fédérations, le vieux principe de la subsidiarité : tout problème politique est à régler au niveau le plus bas, à moins qu’il soit trop faible pour le résoudre seul. Ce principe de hiérarchie montante des niveaux de décision plonge ses racines loin dans le temps, jusqu’au mythiques « libertés germaniques« , objet de disputes interminables entre historiens et idéologues. La plupart des nations germaniques nées de l’ancien Saint Empire Romain sont (ou étaient) des fédérations : l’Autriche, la Suisse (*), la Belgique, l’Allemagne (**), les Provinces Unies (***). Aux Etats-Unis la Fédération repose même sur la souveraineté de l’individu, avant celles des organisations politiques aux souverainetés étagées depuis la commune jusqu’à la fédération.
Cette idée fédérale qui est liée à la notion politique de subsidiarité des pouvoirs est étrangère à l’unitarisme du Royaume de France, puis de la République Française.
Depuis la plus haute antiquité, les Allemands n’ont connu que 12 ans d’unité qui n’ait pas été fédérale, durant la parenthèse national-socialiste d’Hitler, ainsi qu’à l’Est durant les 41 ans du régime communiste (**). En 1945, les Alliés avaient rétabli les Länder abolis par Hitler. La nouvelle fédération occidentale date de 1949, unie avec les nouveaux Länder de l’Est en 1990.[divider][/divider]
(*) La Confédération helvétique repose encore sur une autonomie communale très développée, dans le cadre de Cantons ayant rang d’Etats. [divider][/divider]
(**) Les Fédérations successives ont été le Royaume des Teutons ou Regnum Teutonicum au sein du fédéral Saint Empire Romain (911-1806), Le Fédération du Rhin ou Rheinbund (1806-1815), la Fédération Allemande ou Deutscher Bund (1815-1866 ), la petite Fédération Nord Allemande ou Norddeutscher Bund (1867-1871), Le Deutsches Reich (1871-1949) et la Bundesrepublik de 1949. [divider][/divider]
(***) L’actuel Royaume des Pays-Bas (depuis 1839) est devenu unitariste au moment de la Révolution. D’abord Provinces-Unies (en 1579), ensemble de sept provinces indépendantes les unes des autres (pouvant lever les impôts et armées séparément), elles sont devenues République batave (1795) et Royaume de Hollande (1806) sous la tutelle française napoléonienne.[divider][/divider]
NB : Cet article a été publié initialement dans le N° 202 des « Rencontres Franco-allemandes » publié par les Echanges Franco-Allemands[divider][/divider]